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Alicia Vaisse : nous ne vendons aucun cheval avant l'âge de 3 ans

  • Photo du rédacteur: Admin
    Admin
  • 3 oct.
  • 5 min de lecture

Mouriès : à peine 3500 âmes et pourtant une contrée bien connue de celles et ceux qui, un jour, se sont lancés dans la quête, souvent d'un lusitanien. Au pied du massif des Alpilles et de ses crêtes découpées, il faut pourtant quitter la bourgade provençale et mettre cap à l'Est. Les oliviers filent dans le rétroviseur, au loin, la réserve naturelle des Coussouls de Crau et sa subtile mosaïque se dessine. Le charme d'un panneau, un peu désuet et naturellement camouflé, réveille et attire doucement l’œil du conducteur, le sort d'une forme de torpeur insufflée par une ligne droite hypnotique, propice au pilotage automatique. Au détour d'un chemin, comme aspiré par le discret clapotis des eaux du canal de Craponne, le haras du Coussoul se dévoile à peine : seuls ses « S & V » fixés sur de solides piliers, invitent à franchir sa grille en fer forgé. Comme d'enracinés gardiens du domaine, une vingtaine de platanes contemplent le visiteur du haut de leurs centenaires. Entre ombres et lumières, doucement absorbées ou renvoyées au gré des reliefs de la pierre taillée, entre cyprès, oliviers ou buis plus savamment taillés, la bâtisse au style XVIIIe affiche charme de l'ancien et goût pour la modernité puissamment colorée, parfaitement illustrée par des toiles familiales qui se contemplent, teintées de Matisse, Cézanne et quelques autres de leurs contemporains. Sur la table basse, Decarpentry côtoie l'art moderne. Ici, rien d'étonnant. Au détour d'une fenêtre, le regard est aspiré par un paisible gris : Germanicus des Menauts, dernier témoin d'une histoire débutée à Boiscommun voilà 40 ans. Du haut de ses presque 32 printemps, il semble bien loin le temps où il foulait terrains de Grand Prix et CDI. Ce sont aujourd'hui quelques-uns de ses descendants qui pérennisent à leurs tours, l'héritage d'Alegre et Emir.



Affairées dans les allées de la propriété, deux femmes, affirmées, aux caractères bien trempés : Catherine et Alicia Vaisse. Si la première a le verbe qui claque et l'accent qui chante, la seconde transpire la passion de l'artiste un brin antagoniste. Depuis quelques années déjà, mère et fille ont trouvé l'équilibre entre transmission et conservation ; une vision qui séduit désormais une nouvelle catégorie de cavaliers attirés par la promesse d'un séjour équestre en dehors de notre temps et de ses tourments : "nous avons d'abord été contactées par des scandinaves qui souhaitaient venir chez nous monter à cheval. Ils ont adoré leurs quelques jours et nous ont mis en relation avec une société spécialisée. Très rapidement, nous nous sommes rendues compte qu'il y avait peu d'offres mais beaucoup de gens en recherche d'une équitation douce, cohérente avec les principes du bien-être animal. Je crois que c'est aussi l'illustration d'un monde et d'une conception de l'équitation qui sont en train de changer" explique Alicia. Longtemps enseignante d'art et d'équitation dans l'école alternative du domaine du possible, ses recherches sur le rôle du cheval dans l'apprentissage ont conduit la quadra à avoir une sensibilité à ces sujets "les chevaux nous apprennent énormément sur nous même, je crois d'ailleurs qu'ils manquent à notre société et que c'est ça que les gens viennent aujourd'hui chercher". Australie, Canada, Kenya, États-Unis, Qatar ... entre deux chants de grillons et de cigales, dans les allées du haras les intonations se veulent parfois britanniques mais surtout cosmopolites. "D'une certaine manière, je crois que nous nous intéressons plus au cheval qu'au cavalier, je crois que les gens y sont sensibles et que c'est ça qu'ils ramènent chez eux " explique-t-elle tout en poursuivant "nous tenons à ce que la séance soit toujours agréable pour le cheval. Avec nos intervenants, nous voulons mettre en avant une équitation légère, respectueuse du cheval avec beaucoup d'assiette et peu de main. Le dressage n'est pas très bien perçu aujourd'hui et c'est assez pénible de le constater. Nous sommes donc dans une optique de ralliement au bien-être animal avec des chevaux qui vivent en extérieur le plus possible. Le lusitanien n'a plus à démontrer sa versatilité : ce ne sont pas que des chevaux de haut niveau, ils peuvent aussi convenir aux exigences de la cordelette, de l'équitation de travail ou d'extérieur. Nous mettons ainsi à disposition des chevaux qui sont dynamiques, fins, qui ne sont pas abîmés d'autant que nous ne sommes ouverts que 7 mois par an, aussi pour pouvoir se donner le temps de les faire évoluer".


je crois que nous nous intéressons plus au cheval qu'au cavalier, que les gens y sont sensibles et que c'est ça qu'ils ramènent chez eux

N'allez pas pour autant imaginer que l'élevage et le cheval de sport sont désormais au second plan. Ils sont toujours bien présents avec un petit luxe en supplément : celui de pouvoir prendre davantage le temps " je ne souhaitais plus nous soyons parfois pressées de vendre pour des considérations financières. Nous ne commercialisons pas nos chevaux avant l'âge de 3 ans, avant qu'ils n'aient le temps de vivre en troupeaux : si les clients y tiennent ils peuvent réserver un cheval avant cet âge clé mais nous les encourageons alors à laisser le cheval chez nous pour une vie en groupe ou en grand parc jusqu'à ses 3 ans. Au fond, je crois que nous ne vendons pas que des chevaux mais aussi un bien-être et une éducation. Comme nous faisons naître entre 8 et 14 chevaux chaque année, nous pouvons, et je crois que c'est notre devoir, nous assurer que chacun réussisse sa vie même si ce n'est pas sur le terrain de la compétition. Ma mère amène toujours sa compétitivité naturelle, sa volonté de produire des chevaux extraordinaires. Pour ma part, je m'attache aussi beaucoup à ce qu'ils deviennent et à la création de belles rencontres entre chevaux et cavaliers" ; des rencontres qui s'opèrent parfois justement lors de séjours équestres "si les gens ne sont pas sûrs d'eux, c'est l'option que nous leur proposons. Ils peuvent alors prendre le temps, pendant plusieurs jours de découvrir nos chevaux, de les monter, d'assister aux débourrages, de voir comment ils vivent. Je ne crois pas du tout à l’esbroufe ". Si les fertiles prés du Coussoul voient grandir lusitaniens et croisés, la recherche du juste équilibre entre tradition et modernité s'opère aussi lorsque vient l'heure des mariages de la prochaine année " il me parait important de penser au patrimoine génétique, de le protéger et le conserver, de ne pas seulement se concentrer uniquement sur ce qui est à la mode. Je suis donc tout à fait heureuse d'avoir des Glamourdale et des Jovian mais que nous soyons aussi en mesure de proposer des lignées plus anciennes comme celle de Scapin RBO, Spartacus RBO qui sont certes moins dans le vent aujourd'hui mais qui je crois nous montreront beaucoup à l'avenir. Croisés ou pure race lusitanienne, nous recherchons la même chose : des aptitudes pointues pour le haut niveau et un tempérament qui permet de s’épanouir dans différentes disciplines ".



1ère photo : Alicia Vaisse accompagnée de Lord Naxos du Coussoul (Quaterback x Naxos du Coussoul)


Entre séjours et élevage, quand la lumière du soir vient doucement s'éteindre sur ses façades aux volets d'un vert mentholé, le Domaine du Coussoul, Amada, Palatine, Phoenix, Pissaro, Odyssee, Olympe, Orlando, Orso, Ourdy, Ouragan, Oural, Overdale, Ondine ou encore Utopia s'assoupissent sur les songes de leur avenir mêlés d'éthique d'esthétique, de tradition et de compétition.


crédits photos : fgwildlife (coucher de soleil et portrait d'Alicia Vaisse accompagnée de Lord Naxos du Coussoul) et coll privée


 
 
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